La semaine dernière nous vous parlions de l’impact écologique du riz sur la couche d’ozone. Cette semaine nous continuons à parler de riz et d’agriculture en abordant cette fois les thèmes de l’appellation contrôlée et de la transition vers le bio.
L’IGP : un cahier des charges stricte
En Camargue, pour obtenir l’IGP (identification géographique protégée) pour le riz, il faut obligatoirement assécher 2 fois les rizières pendant la culture du riz. Au mois de mai et au mois de septembre, l’eau des rizières est vidée.
Aussi, chaque rizière se doit d’avoir son entrée et sa sortie d’eau individuelle. Le déversement d’une rizière à l’autre, comme on en a l’image dans les pays asiatiques, est strictement interdit en France. Cela permet d’éviter l’accumulation de produits, quand il y en a (car toutes les cultures ne sont pas forcément bio). Ce système impose des frais d’installation supplémentaires qui viennent s’ajouter aux charges des agriculteurs. Cela contribue à l’impossibilité de concurrencer les prix du marché des autres pays, libres de ce genre de contraintes.
L’eau des rizières vient du Rhône grâce à une station de pompage et retourne ensuite aux marais et à la mer. Les rizières permettent de désinfecter l’eau grâce à l’exposition longue au soleil. L’eau est donc plus propre quand elle rejoint la mer que quand elle a quitté le Rhône s’il s’agit d’une culture bio.
Il y a différentes variétés de riz en Camargue (parfumé, long, rouge, rond, noir, complet…). De manière générale l’agriculture française est plus précautionneuse que certains de ses voisins européens. Les normes européennes ne sont pas forcément uniformes. En France pour le riz non bio, il y a 5 produits phytosanitaires autorisés contre 25 en Italie et en Espagne.
En Camargue cependant même si on ne cultive pas bio, l’usage de l’engrais n’est pas si simple car les grosses pluies d’hiver le chasse aussitôt qu’il est mis. Il est donc interdit de mettre de l’engrais en hiver. De plus, les terres sont régulièrement analysées pour voir le taux d’azote présent dans le sol. Il en faut mais pas trop et s’il en manque, il est ajouté par l’homme. Être agriculteur en France c’est aussi tenir un cahier de bord expliquant tout ce qui est fait et tout ce que l’on veut faire en le justifiant.
Pour vérifier que les critères de l’IGP soient bien respectés, beaucoup de contrôles sont faits, sur le terrain mais aussi par satellite. Le contrôleur a tout les droits pour venir vérifier les rizières ou les bâtiments en lien avec la production. Il fait également des prélèvements pour vérifier la qualité de l’eau.
La transition vers le bio : des contraintes peu encourageantes
Le gros problème de la transition vers le bio c’est la diminution des rendements alors que l’on ne peut pas encore s’afficher comme bio et justifier une hausse des prix. L’État donne des primes pour la transition ce qui permet, en théorie, aux agriculteurs de se maintenir. Dans les faits, celle-ci est rarement suffisante.
Cultiver du riz en Camargue est à la base une manière naturelle de dessaler les sols. En effet, la Camargue est en grande partie sous le niveau de la mer et le sel se dépose à chaque fois que l’eau rentre. L’utilisation de l’eau douce, de l’eau du Rhône, permet de faire redescendre le niveau de sel. Après 3 ans de culture de riz on obtient une terre qui peut accueillir une année de culture sèche comme le blé ou la luzerne avant de redevenir trop salée. Le problème c’est que pour bien faire du bio, il faudrait des rotations de culture plus longues, ce qui est presque impossible en Camargue. La gestion pour arriver au bio est donc très compliquée.
Le cahier des charges du bio indique qu’il faut diversifier ses cultures, on ne peut pas faire 100% de riz. La culture principale ne doit pas dépasser 80% de la surface exploité. 5% de la surface sont dédiés à l’environnement. C’est des surfaces d’intérêt écologique comme des prairies ou des jachères fleuries. Il est interdit de tirer des revenus sur cette parcelle.
De plus, la transition vers le bio est assez longue, il faut au minimum 3 ans sans engrais ni produits phytosanitaires pour pouvoir obtenir la certification écocert.
Le monde de l’agriculture est à deux vitesses, il y a une volonté de faire attention, de faire du bio et de respecter l’environnement. Mais de l’autre côté c’est énormément de contraintes, accompagnées bien souvent par une baisse des revenus des agriculteurs. Pour aider les agriculteurs qui souhaitent nous offrir du “mieux manger”, il faut privilégier le circuit court. Le fait d’acheter en direct et près de chez soit permet au producteur de vendre au même prix mais d’en tirer plus car il y a moins d’intermédiaires à rémunérer en chemin.
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